TRIBUNE “Non à la mort programmée de l’Afpa” (Collectif syndical)

Cette tribune a été publiée initialement dans l’AEF le 14 novembre 2025)

Pour signer la pétition, non à la mort programmée de l’AFPA

Anciennes et anciens responsables syndicaux de l’AFPA (Agence nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes), nous alertons :

Les nouvelles mesures d’austérité budgétaire inscrites dans le PLF 2026 s’ajoutent au coup de rabot de 2025 et à la baisse continue des achats de formation par les Conseils régionaux. Les conséquences : de très fortes réductions d’effectifs et des fermetures de centres, de formations, de services d’hébergement et de restauration.

C’est le droit pour tous de bénéficier d’une formation professionnelle réussie qui est menacé ! 

L’AFPA offre chaque année à des dizaines de milliers de personnes, sur l’ensemble du territoire, un service inestimable : l’acquisition d’une qualification reconnue, l’accès à un emploi, l’occasion de rebondir dans sa vie professionnelle. 

En accueillant en priorité les publics les moins qualifiés, elle participe à la lutte contre les inégalités et réalise ce que Condorcet appelait de ses vœux : « L’instruction ne devrait pas abandonner les individus au moment où ils sortent de l’école ; […] elle devrait embrasser tous les âges ; […] cette seconde instruction est d’autant plus nécessaire que celle de l’enfance a été resserrée dans les bornes les plus étroites. » 

Alors que les licenciements se multiplient, l’AFPA peut, si on lui en redonne les moyens, mettre sa longue expérience en matière de reconversions au service des politiques publiques, et accompagner la reconquête de la souveraineté industrielle de la France ainsi que la transition écologique, dont la réussite nécessitera un effort exceptionnel de qualification des travailleurs.

Quand l’État a eu besoin récemment de l’AFPA pour diffuser l’utilisation d’outils numériques, accompagner des jeunes décrocheurs ou aider à l’intégration de réfugiés, l’Agence a toujours répondu présente.

Nous demandons que cette utilité sociale soit prise en compte dans les décisions qui vont être prises. 

Nous le demandons avec d’autant plus de force que cette utilité sociale se double d’une efficacité économique et que cette dernière a pu être mesurée.

Une étude réalisée par le cabinet Koreis et rendue publique en novembre 2024 a analysé pendant deux ans les parcours de plus de 73 000 demandeurs d’emploi formés à l’AFPA, comparés à l’ensemble des demandeurs d’emploi formés dans la même période. Elle a pu ainsi déterminer un double impact positif des formations AFPA sur les finances publiques, qu’elle a quantifié. 

D’une part, chaque retour à l’emploi génère de nouvelles recettes via les cotisations salariales et patronales. D’autre part, il permet d’éviter des dépenses sociales (allocations chômage, RSA, ASS, APL…) qui ne sont plus versées grâce à l’accès à l’emploi. Ainsi, les formations de l’AFPA génèrent un impact économique positif évalué à 121 M€ pour les 73 000 personnes considérées par l’étude. 

L’activité de l’AFPA n’est pas une charge insupportable pour les finances publiques, c’est un investissement efficace socialement et économiquement.

Dans le monde de l’orientation et de la formation, l’AFPA n’est pas le seul dispositif en situation difficile ou périlleuse. On peut citer les lycées professionnels soumis à une réforme à l’opposé des besoins des élèves ; les GRETA qui connaissent des situations financières de plus en plus tendues ; deux centres régionaux du CNAM soumis à redressement judiciaire ; des structures de l’Économie Sociale et Solidaire mises en péril par la spirale des appels d’offres au moins-disant ; les Bilans de compétences exclus des mesures éligibles au CPF ; le Centre INFFO privé de toute subvention de l’État en 2026 ; les OPCO soumis à la TVA et donc à une amputation de leurs capacités de financement ; France Compétence dont la dotation de l’État est amputée ; les Missions locales également durement éprouvées…

Nous partageons le diagnostic du SYNOFDES (qui fédère les organismes de formation de l’Économie sociale et solidaire) : de façon globale, « l’appareil de formation est en péril ». Nous appelons, nous aussi, à « ne pas sacrifier la formation professionnelle sur l’autel de l’austérité ».

Convaincus qu’un véritable débat public est devenu une urgence, nous soutenons la demande formulée par l’intersyndicale AFPA d’une table-ronde sur l’avenir de la formation professionnelle en France, organisée avec tous les acteurs concernés.

Nous considérons qu’il est aujourd’hui indispensable de rompre avec des politiques mortifères. 

Il faut reconstruire un service global prenant en compte l’ensemble des besoins des personnes : l’orientation, la formation, l’ingénierie de formation, les services associés (hébergement, restauration, suivi médical et social, rémunération).

Il faut doter l’AFPA d’un plan d’investissements pluriannuels pour rénover et moderniser ses Centres de formation (bâtiments, plateaux techniques de formation, hébergements) et permettre l’accès aux personnes en situation de handicap.

Il faut engager des coopérations entre les différentes composantes du service public en vue d’une offre adaptée à des besoins diversifiés.

L’expérience professionnelle, l’engagement et le travail des salariés doivent être reconnus dans les conditions de travail et de rémunération.

Il faut lever les freins à l’entrée en formation des publics les plus modestes : revalorisation des rémunérations des stagiaires, hébergement gratuit pour ceux qui sont contraints à la mobilité, restauration à des prix modiques, aide pour se déplacer et garder les enfants.

Enfin, de nouvelles modalités de financement public doivent être mises en place pour garantir la pérennité d’une offre de formation diversifiée et du maillage territorial, conditions d’accès pour toutes et tous à la formation.

Nous rejoignons celles et ceux qui, comme nous, veulent mettre un coup d’arrêt à la disparition programmée du service public de la formation professionnelle. Nous appelons les parlementaires, les conseillers régionaux et tous les décideurs concernés à prendre leurs responsabilités. 

Les premiers signataires :

  • Béatrice Arsac, ancienne secrétaire nationale et trésorière de la CGT AFPA
  • Evelyne Artaud, ancienne membre SUDFPA du Comité central d’entreprise de l’AFPA
  • Roland Audrerie, ancien secrétaire CGT du Comité central d’entreprise de l’AFPA
  • Yves Béchart, ancien secrétaire général de la CGT AFPA
  • Catherine Bensaad, ancienne secrétaire CFDT du Comité central d’entreprise de l’AFPA
  • Eric Carpentier, ancien secrétaire général SUDFPA
  • Thierry Cheype, ancien représentant CFDT du personnel au Conseil d’administration de l’AFPA
  • Yann Cherec, ancien secrétaire général de la CGT AFPA
  • Pierre Confavreux, ancien secrétaire général de la CFDT AFPA
  •  Jacques Coudsi, ancien secrétaire général de la CGT AFPA
  •  Jean-Paul Dekooninck, ancien secrétaire général de la CFDT AFPA
  • François Duval, ancien délégué syndical central SUDFPA
  • Christian Filliot, ancien secrétaire général de la CGT AFPA
  •  Jean François Guerut, ancien secrétaire général du Syndicat CFDT de l’AFPA
  •  Alain Guillemot, ancien secrétaire général du Syndicat CFDT de l’AFPA
  • Christian Houël, ancien secrétaire CGT du Comité central d’entreprise de l’AFPA
  • François Lacroix, ancien membre SUDFPA du Comité central d’entreprise de l’AFPA
  • Michel Leclerc, ancien secrétaire général du Syndicat CFDT de l’AFPA
  • Daniel Martin, ancien secrétaire CFDT du Comité central d’entreprise de l’AFPA
  • Pierre Mauguet, ancien membre SUDFPA du Comité central d’entreprise de l’AFPA
  • Chantal Noël, ancienne secrétaire générale de SUDFPA
  • Françoise Piaget, ancienne membre SUDFPA du Comité central d’entreprise de l’AFPA
  • Catherine Ribot, ancienne secrétaire CGT du Comité central d’entreprise de l’AFPA
25 novembre 2025 6:31 Publié par